Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
25 décembre 2013 3 25 /12 /décembre /2013 21:22

Depuis 15 ans, l'industrie pharmaceutique se transforme en France : peu à peu, les grands groupes pharmaceutiques cèdent leurs usines à de nouveaux acteurs spécialisés dans la production, des sous-traitants que l'on appelle des façonniers. Selon une étude de Xerfi, le marché français du façonnage a été multiplié par six en 15 ans.

Les groupes pharmaceutiques soutiennent officiellement que la production n'est pas pour eux un domaine stratégique et qu'ils préfèrent se concentrer sur la recherche, le développement et le marketing de leurs produits ; en réalité, ils orientent aussi de plus en plus leur production vers les pays émergents et leurs efforts de développement vers les vaccins et la bio-production et, phénomène moins reconnu, ils abandonnent les investissements de production en France alors qu'ils continuent à investir dans les autres pays d'Europe.

 

Les groupes pharmaceutiques sont certes confrontés à la concurrence toujours plus forte des génériques pour leurs produits matures, d'où une baisse de volume de production sur de nombreux sites. En parallèle, l'efficacité de leur recherche et développement tend à diminuer ; toujours plus d'investissements sont nécessaires sans que cela se concrétise par la sortie d'un nombre croissant de nouveaux médicaments vraiment innovants, des « blockbusters », avec un potentiel de vente de plusieurs milliards d'euros. Selon une étude récente de Deloitte et Thomson Reuters sur l'innovation pharmaceutique, les grands laboratoires projettent un taux de retour d'investissement en baisse pour leurs produits en développement ; ce taux aurait été réduit de 10,5% en 2010 à 4,8% en 2013. On constate ainsi un effet de ciseau entre potentiel de chiffre d'affaires en baisse et coûts de développement en hausse.

 

Fareva, leader des façonniers

 

Face à des groupes pharmaceutiques qui s'efforcent de préserver leur avenir par de multiples moyens, notamment en réduisant leurs investissements en production, les façonniers ont pris une place majeure, en reprenant aux groupes leurs sites industriels en difficulté. Le leader en France est Fareva, un groupe détenu par Bernard Fraisse qui l'a fondé à 28 ans en 1985 avec son frére Jean-Pierre, à St Félicien en pleine campagne ardèchoise, non loin d'Annonay et de Tournon. Depuis ses débuts, la société s'est focalisée sur la formulation, la fabrication et le conditionnement pour le compte d'autres groupes, d'abord dans les produits ménagers industriels, puis dans les cosmétiques à partir de 1995, les produits pharmaceutiques à partir de 2002 et enfin alimentaires à partir de 2008. Fareva est présente dans 10 pays avec 31 sites, en France, Allemagne, Royaume-Uni, Suisse, Ukraine, Russie, Turquie, Italie, Brésil et aux Etats-Unis ; son chiffre d'affaires qui est passé de 8,4 millions € en 1991 à 100 millions € en 2000, a atteint 1,075 milliards € en 2012 avec 7 500 employés, l'activité pharmaceutique représentant près de 50% du total.

L'avantage principal du façonnier est de pouvoir faire travailler un même site industriel pour plusieurs clients, avec l'engagement initial du cédant de lui confier la sous-traitance des produits déjà traités par le site.

Mais en plus, Fareva, tout en sachant démarcher d'autres clients pour ses capacités de production, investit chaque année 45 millions € en équipement et développe de nouveaux conditionnements dans ses laboratoires de R&D.

 

Les façonniers au service des start-ups

 

La capacité de production et de conditionnement des façonniers se met également au service des start-ups ; cela permet à ces dernières de se concentrer sur le développement de leur produit et, en cas de succès, de pouvoir démarrer la production sans investissement majeur.

C'est ainsi que Fareva collabore avec la start-up Keocyt qui développe des anticancéreux ; et la jeune entreprise Maia Woundcare, qui a inventé un pansement dynamique qui stimule les cellules responsables de la cicatrisation, sous-traite également sa production à Fareva.

 

On constate que, comme dans la plupart des industries notamment l'automobile et l'électronique, la sous-traitance des façonniers joue un rôle essentiel dans la flexibilité et la capacité d'adaptation de l'industrie pharmaceutique. Les grands groupes qui étaient jusqu'à présent très intégrés verticalement, libèrent ainsi plus de ressources pour les produits d'avenir, tout en poursuivant avec les façonniers, la fabrication des produits matures dans de bonnes conditions de compétitivité.

Le premier groupe mondial Pfizer qui a confié aux façonniers 30% de sa production, semble montrer la voie.

Partager cet article
Repost0
17 novembre 2013 7 17 /11 /novembre /2013 17:09

Inventel 1990, Withings 2008, Sculpteo 2009, Invoxia 2010, c'est la série d'entreprises créées par Éric Carreel. Chaque fois,  associé avec un ou plusieurs partenaires – chercheur et/ou développeur d'entreprise, É. Carreel a fondé des jeunes pousses autour d'innovations et de créations de produits technologiques.

 

L'ESPCI

 

É. Carreel est issu de l'ESPCI, École Supérieure de Physique et de Chimie Industrielles de la ville de Paris, renommée pour la qualité de sa recherche, où 6 ingénieurs diplômés sur 10 effectuent un doctorat. Les 17 laboratoires de l'ESPCI, toujours situés sur la Montagne Sainte Geneviève, au coeur du Quartier Latin, à proximité de Normale Sup, sont une pépinière exceptionnelle de chercheurs avec 5 prix Nobel – Pierre et Marie Curie, Irène et Frédéric Joliot-Curie, Pierre-Gilles de Gennes et Georges Charpak. Malgré sa petite taille, l'ESPCI pointe dans les 300èmes au classement de Shanghaï, non loin de Polytechnique, et prétend être au premier rang des écoles d'ingénieurs dans le classement.

 

Depuis sa création en 1882, avec Pierre Curie à sa tête, la stratégie de l'ESPCI est de bannir toute barrière entre recherche fondamentale et recherche appliquée. Les chercheurs sont évalués sur la qualité de leurs relations avec l'industrie et fortement incités à déposer des brevets d'invention, brevets dont ils gardent la maîtrise. C'est ainsi, qu'au sein de l'école, un brevet par semaine est déposé, en faisant le numéro 1 en France parmi les écoles d'ingénieurs.

L'une des jeunes pousses créées au sein de l'école en 1902 par Georges Claude, est devenue l'Air Liquide.

 

Pour faciliter la création d'entreprises, le dépôt de brevets par ses chercheurs et attirer des chercheurs étrangers, l'école associée à la Mairie de Paris et à l’Association des ingénieurs ESPCI (AIE), a créé en décembre 2010, le Fonds de dotation Georges Charpak financé par des entreprises et des donateurs, notamment Total Petrochemicals, Schlumberger, Lundbeck et Xavier Niel.

Parmi les premiers projets financés par ce fonds, Capsum, créée par les chercheurs Sébastien Bardon et Jérôme Bibette, développe de nouveaux matériaux en "microfluidique" pour l'industrie des cosmétiques ; il y a aussi l'Aixplorer, un échographe ultrarapide qui utilise les principes du "retournement temporel", inventé par Mathias Fink, chercheur à l'école, à l'origine de la création de Supersonic Imagine.

 

L'école a su ainsi créer un écosystème favorable à l'industrialisation de la recherche et à la création d'entreprise. Et le direction de l'école n'est pas la dernière à donner l'exemple : Jacques Lewiner, directeur scientifique de 1987 à 2001 (et maintenant président du Fonds Georges Charpak), a déposé près de 1000 brevets français et étrangers et créé 5 entreprises : Finsécur, Roowin, Cynove, Cytoo et Inventel (avec É. Carreel).

 

Inventel

 

Fondée en 1990 par É. Carreel et J. Lewiner, la jeune entreprise après avoir tenté le marché des télécopieurs, s'est lancée en 1993 dans la réalisation de « pagers », terminaux de poche de radiomessagerie, qui ont eu une heure de gloire éphémère avant que les téléphones portables ne deviennent numériques et hyper compétitifs. Elle a développé ensuite des équipements sans fil pour les réseaux de téléphonie fixe, utilisant les technologies BlueTooth, DECT et Wi-Fi. Son activité a vraiment décollé au début des années 2000 avec la sortie de modems ADSL supportant le Wi-Fi dont la Livebox pour France Télécom. Après une première levée de fonds de 6 millions € en 2001 auprès de Banexi et d'Innovacom, le chiffre d'affaires a cru rapidement atteignant 45 millions € en 2004 avec 75 employés. Inventel a été rachetée par Thomson MultiMedia (devenue Technicolor) en 2005 pour 135 millions € environ, soit le chiffre d'affaires prévu pour cette année-là.

 

Withings

 

Après être resté quelque temps chez Thomson à la direction technique, É. Carreel repart à la création d'une nouvelle entreprise avec Frédéric Potter, cofondateur de Cirpack (également cédé à Thomson) et un jeune Centralien Cédric Hutchings : Withings. Le fil conducteur des produits de Withings est d'enrichir des produits du quotidien – bien-être et santé, avec une liaison Internet permettant l'offre de nouveaux services. Le contrôle des produits est aussi déporté par exemple vers un iPhone, un BlackBerry, un téléphone Android ou un iPad. Bien que bénéficiant de fonctionnalités beaucoup plus évoluées, l'aisance d'utilisation des produits reste optimale grâce à l'ergonomie des smartphones et des tablettes.

Le premier produit est une balance pèse-personne lancée en 2009 en France, en Europe et aux Etats-Unis. Au printemps 2011, il est suivi par le tensiomètre, puis fin 2011, par le Smart"Baby Monitor" permettant la surveillance à distance d'un bébé.

 

Ce développement rapide à l'international a d'abord été financé en septembre 2010 par une levée de fonds de 3 millions € avec Ventech, puis en juillet 2013, par une nouvelle levée de fonds de 23,5 millions € auprès de BPIFrance (11 millions €), IdInvest Partners, 360 Capital Partners et Ventech.

90% des ventes se situent hors de France, 45% aux Etats-Unis, 30 % en Europe hors France, 15% en Asie-Océanie.

.

 

Withings se concentre sur la conception avec des designers et la commercialisation, la production étant largement sous-traitée. On notera qu'Apple est organisée de la même manière et que, quand le marché a changé avec la concurrence asiatique et l'émergence des smartphones, Nokia a été handicapée par ses nombreuses usines dédiés à des produits obsolescents.

Contrairement à ce que pensent certains politiques, le coeur du métier d'innovateurs comme Withings est la conception et la commercialisation de produits et non la production. Attention à ne pas investir les fonds collectés dans des outils de production dont la compétitivité serait douteuse.

On peut d'ailleurs s'inquiéter de la présence de BPIFrance au capital de Withings et des pressions qu'elle pourrait recevoir des politiques.

Partager cet article
Repost0
14 novembre 2013 4 14 /11 /novembre /2013 21:41

Cameleon Software côtée en Bourse et classée 82ème en 2013 au palmarès Truffle des éditeurs français de logiciels, vient d'accepter une offre publique d'achat de l'éditeur texan PROS qui est huit fois plus gros – ventes de 130 millions $ pour 13 millions € à Cameleon. Le prix offert de 2,05 € est 45% supérieur à la moyenne récente des cours. Les dirigeants et les deux fonds d'investissements IRDI et Sopromec soit 26% du capital, vont apporter toutes leurs parts !

 

PROS est un spécialiste des logiciels d'analyse des flux massifs de données (« big data ») en vue d'optimiser les ventes. Il a notamment développé les algorithmes de « yield management » utilisés par les compagnies aériennes, les chaînes d'hôtels, les loueurs de voitures, etc. pour moduler les prix de vente en fonction de la demande et du remplissage des capacités disponibles. Cameleon développe depuis 1987 des solutions de CPQ – automatisation de la configuration des produits et des devis. Depuis deux ans, le marché évolue rapidement, avec des offres en mode SaaS. Le leader américain Big Machines vient d'être racheté par Oracle, un autre concurrent Apptus vient de lever 37 millions $ et des jeunes pousses comme Glider lancent des offres de service légères et compétitives.

 

En annonçant leur accord, les dirigeants de PROS et de Caméleon expliquent qu'ils pourront ensemble proposer une offre combinée d'optimisation des prix (grâce à l'analyse des big data) de configuration des offres et de présentation de devis – le savoir-faire de Cameleon. Dans un marché en pleine évolution avec l'intervention de poids lourds comme Oracle, on peut comprendre et apprécier que ces deux acteurs de petite taille relative réunissent leurs forces.

 

L'autre facette du projet est l'anticipation d'une croissance plus rapide de Cameleon sur le marché nord-américain qui constitue actuellement 35% de ses ventes. En parallèle, PROS espère se développer en Europe à partir de sa nouvelle filiale toulousaine.

 

Créé en 1987, Cameleon et PROS qui existe depuis 1986 sont presque jumeaux ; dans l'univers bouillonnant du logiciel, ils ont progressivement développé leur activité autour de spécialités de niche, où leur savoir-faire est reconnu. Mais dans un monde où des mastodontes comme SAP, Microsoft, Oracle s'intéressent de plus en plus au processus de vente, et se mesurent à une étoile des logiciels de vente et quasi-inventeur du SaaS, qui a pour nom Salesforce.com, on peut se demander si cette union n'est pas tardive. Les dirigeants et actionnaires de Cameleon, font eux certainement un bonne affaire en cédant leurs parts avec une prime élevée, et le fondateur Jacques Soumeillan, officiellement restant avec la direction de PROS, a sûrement envie, depuis près de 30 ans à la tête de Cameleon, de partir vers d'autres projets ou horizons.

 

Ce qu'on peut souhaiter, c'est que les autres sociétés de logiciel au palmarès de Truffle trouvent la formule magique pour grandir plus vite, prendre rapidement des positions solides sur les principaux marchés existants pour se focaliser ensuite sur les marchés émergents comme les BRICS. On pensera bien sûr à la belle histoire de Criteo qui en 6 ans est déjà 50 fois plus gros que Cameleon vieux de 26 ans.

Partager cet article
Repost0
21 octobre 2013 1 21 /10 /octobre /2013 22:27

Le 17 octobre 2013, la prise de contrôle du canadien Humanware par Essilor, leader mondial des verres ophtalmiques, est annoncée. Humanware, une PME québecoise issue de la fusion en 2005 entre VisuAide créée en 1988 et PDI, avec un chiffre d'affaires de 35 millions $, est un des constructeurs majeurs d'aides techniques pour les malvoyants et les non-voyants. Elle distribue ses produits en Amérique du Nord, Europe, Moyen Orient, Asie et Australie.

 

Cette intervention d'Essilor va considérablement perturber un marché de niche où une dizaine d'acteurs internationaux se partage un potentiel d'environ 140 millions de personnes déficientes visuelles, dont seulement 5% possède des équipements adaptés, ceux-ci leur étant souvent inaccessibles financièrement. Selon Essilor, compte tenu notamment du vieillissement de la population, 400 millions de personnes souffriront de déficience visuelle en 2050.

 

Il s'agt là d'une incursion d'Essilor sur une nouveau segment, alors que jusqu'à maintenant, les ventes étaient réparties à 90% : verres opthalmiques, 10% : équipement pour le opticiens. Le défi sera sans doute de savoir développer les ventes via le réseau commercial d'Essilor qui n'est pas formé sur les équipements pour déficients visuels.

 

Essilor va cependant apporter une réseau mondial de relations privilégiées avec les opticiens, les chaînes, les centrales d'achat et les indépendants, qui sont déjà les principaux revendeurs d'aides techniques pour les malvoyants. Aucun doute que ces relations vont permettre à Humanware de prendre des marchés à ses principaux concurrents comme Freedom Scientific (USA, leader mondial actuel), Optelec (Pays-Bas), Hims (Corée du Sud). Sur le marché français, son marché domestique, le soutien d'Essilor va certainement renforcer la présence d'Humanware.

 

Les capacités d'innovation et de R&D d'Essilor vont permettre à Humanware de sortir des produits avancés et performants. Nous en avons déjà un témoin avec le Prodigi, un nouvel assistant de vision numérique, qui vient d'être lancé et dont l'assistant d'installation a été développé avec la collaboration d'Essilor.

 

 

Partager cet article
Repost0
30 septembre 2013 1 30 /09 /septembre /2013 20:55

SuperSonic Imagine, fondée en 2005 à Aix en Provence, a lancé un échographe révolutionnaire en mi-2009 et a réalisé un chiffre d'affaires de 14 millions € en 2012 dont 80% hors de France. Elle a déjà convaincu de nombreux investisseurs du potentiel important de son produit : l'Aixplorer, et a levé un total 99 millions d'€ auprès d'un cercle impressionnant d'investisseurs : Edmond de Rothschild Investment Partners, Auriga Partners, Omnes Capital, CDC Entreprises, NBGI Ventures, Wellington Partners, iXO Private Equity, Mérieux Développement et dernièrement, via une quatrième levée de 28 millions : Kuwait Life Sciences Company (KLSC), Alto Invest et le FSI pour 14 millions €.

 

Une part du succès de ces levées de fonds successives repose sûrement sur la qualité de l'équipe des fondateurs : 8 experts du domaine dont Georges Charpak, prix Nobel de physique en 1992, et d'autres chercheurs de haut niveau issus de Supelec ou de l'ESPCI. Tous ces experts doivent additionner un nombre d'années de recherche considérable dans le domaine des ultrasons.

 

Certifié FDA aux Etats Unis depuis 2009, l'Aixplorer est déjà homologué et commercialisé dans 54 pays, dont le Japon, la Chine avec un bureau à Pékin, l'Allemagne et bien sûr les Etats-Unis. Avec cette cagnotte de près de 100 millions €, SuperSonic Imagine poursuit ainsi un développement international à marches forcées. Il est certain que, sur le marché mature de l'échographie, il est nécessaire de faire preuve d'ambition et de beaucoup de dynamisme pour prendre des marchés d'assaut, comme le fait SuperSonic Imagine.

 

Selon son fondateur Jacques Souquet, "Notre idée de départ était de développer un appareil pour l'échographie du sein qui caractérise mieux les lésions afin de diminuer le nombre de biopsies pratiquées". Aixplorer, qui ciblait au départ le cancer du sein, est capable de couvrir tout le champ radiologique avec des performances inédites, sa grande précision du diagnostic lui permet de cibler également le cancer de la prostate ou la fibrose du foie. A l'origine du projet, il y a une rupture technologique : c'est le seul échographe à imager deux types d’ondes et d'obtenir une meilleure caractérisation des tissus ; l’onde ultrasonore assure une qualité d’image exceptionnelle et l’onde de cisaillement, ou shear wave, qui mesure et affiche en temps réel l’élasticité des tissus grâce à une cadence d’acquisition 200 fois plus rapide que les systèmes conventionnels.

 

Quelques points d'interrogation

 

Depuis le lancement de l'Aixplorer, la société perd de l'argent. En 2010 et 2011, cette perte a été d'un montant pratiquement équivalent au chiffre d'affaires de 10-11 millions €. Espérons qu'en 2012, la perte a été réduite (les comptes 2012 n'ont pas encore été publiés) et que l'on constate une convergence rapide vers un point d'équilibre.

 

Ce qui m'inquiète est que l'équipe des fondateurs est composée uniquement de chercheurs. Dans l'équipe de direction, on trouve un directeur financier qui apparaît comme une star des levées de fonds, et on en a vu le résultat. Les équipes commerciales et de support sont dirigées par des alumni de Philips Medical et d'ATL, des vieux routiers comme Jacques Souquet. Le focus est sur l'expérience, la connaissance du marché. Mais tout cela est-il suffisant face aux mastodontes de l'équipement médical que sont GE, Toshiba, Siemens ?

 

La société met clairement le cap sur la Chine, où il y a de grands projets de construction d'hôpitaux – plus de 3 000 ! Il est certain que les pays émergents ont besoin d'équipements médicaux mais Aixplorer est-il compétitif dans ces pays ?

 

SuperSonic Imagine a beaucoup d'atouts, j'invite mes lecteurs à la suivre. Assiste t'on à l'émergence d'une nouvelle étoile dans le ciel de l'équipement médical ?

Partager cet article
Repost0
21 septembre 2013 6 21 /09 /septembre /2013 20:55

Présent sur le site de réseau professionnel LinkedIn, Richard Branson est suivi par plus de 2,5 millions de sympathisants. C'est une sorte de blog où il publie régulièrement des commentaires. Les thèmes les plus récurrents sont l'entrepreneuriat et la création d'entreprises. En la matière, R. Branson est certainement un expert ; sa première entreprise, le journal Students, il l'a créée à 16 ans ; il est maintenant à la tête de plus de 200 entreprises dans les domaines les plus divers : téléphonie, musique, finances, trains, avions, conquête de l'espace, hôtels, remise en forme, jeux, voyages, sodas,... dont les seuls points communs sont Richard Branson lui-même et sa marque fétiche Virgin.

 

Il est certain que la notoriété de sa marque (#1 en Grande Bretagne) lui permet de lancer maintenant de nouvelles activités avec des coûts de promotion plus réduits. La diversité de ses entreprises est telle que R. Branson est toujours crédible quand il démarre une activité pourtant entièrement nouvelle pour lui. Il en résulte une sorte de synergie globale entre toutes ces « Virgin ». De plus une nouvelle activité peut bénéficier de l'aide d'une autre pour se développer plus vite. Ainsi les détenteurs américains de nouveaux contrats d'assurance Virgin peuvent bénéficier de tarifs préférentiels sur Virgin Altlantic.

 

On peut se demander pourquoi, contrairement à la plupart des entrepreneurs, il a créé et continue de créer des entreprises dans des domaines nouveaux et si divers. Son credo « S'amuser en travaillant », son appétit pour les défis et sa créativité débordante en sont sûrement l'explication. Souvent les entrepreneurs créent des affaires en série, consacrant successivement leur temps et leur énergie à plusieurs affaires, en démarrant une après avoir vendu la précédente. R. Branson offre le spectacle unique de mener plusieurs créations en parallèle avec succès. C'est en quelque sorte un feu d'artifice quasi permanent. Je connais deux ou trois entrepreneurs qui ont cette capacité, mais certainement pas poussée au niveau atteint par R. Branson et surement pas dans la durée, comme il le réussit depuis plus de 30 ans !

 

Sur sa page LinkedIn, Richard Branson prodigue des conseils en cinq points, à ceux qui projettent de créer leur entreprise :

  • Ecoutez plus que vous ne parlez ; nous avons deux oreilles et une bouche, les utiliser dans la même proportion n'est pas une mauvaise idée ; gardez toujours vos oreilles grandes ouvertes, des idées brillantes peuvent émerger de l'endroit le plus inattendu !

  • Faites simple ; maintenir l'accent sur l'innovation ; un simple changement pour le mieux est beaucoup plus efficace que cinq changements compliqués pour le pire,

  • Soyez fier de votre travail ; vos collaborateurs sont les meilleurs avocats de votre marque : aidez-les à être fiers de leur travail,

  • Ayez du plaisir dans votre entreprise ; si ce n'est pas le cas, il est temps de vous lancer sur autre chose, un sourire et une plaisanterie peuvent vous mener loin,

  • Surmontez vos échecs et recommencez ; ce qui est important est de savoir en tirer des enseignements, trouver ce qui est positif et ce qui peut être amélioré,

 

Sa réussite, c'est peut-être grâce à l'application parfaite de ces conseils depuis des années.

Partager cet article
Repost0
30 juillet 2013 2 30 /07 /juillet /2013 22:56

Le chauffage au bois est en plein développement : 6 millions de foyers français seraient déjà équipés d'un poêle à bois ; entre 2011 et 2012, selon l'observatoire des énergies renouvelables, les ventes de poêles ont progressé de 16% et celles des chaudières à bois de 14% . Depuis 2005, les ventes de poêles ont été multipliées par 2,5 et tandis que celle des chaudières ont augmenté de 4% seulement. Les poêles dominent le marché des appareils de chauffage individuel au bois, avec une croissance très marquée des granulés. En 2012, le chiffre d'affaires de la filière a été de 560 millions €. Le prix moyen des poêles est de 1 000 €, celui des chaudières de 3 400 € (5 700 € automatiques à granulés) : à l'évidence les premiers constituent plutôt l'élément d'appoint d'un système existant et s'adressent à un large public, tandis que les secondes équipent un logement en chauffage de base, donc soit lors de la construction soit en remplacement d'une vieille chaudière au fioul.

Ce fort engouement pour les poêles et chaudières à granulés, est causé en particulier par leur fonctionnement automatique et leur simplicité d'emploi. Naturellement les incitations fiscales ne sont pas pour rien dans cette évolution.

 

C'est dans cet environnement favorable qu'Invicta se distingue, proposant des poêles à bois en fonte à 400 €, mettant l'accent sur la qualité et le design. C'est maintenant le numéro un de la filière avec un chiffre d'affaires de 74 millions, en croissance de 35% en 5 ans et dont 1/3 à l'export. Créée en 1924, par le grand-père de Jean-Pierre Dupire, Invicta vient d'être cédée par ce dernier à un fonds d'investissement : Qualium qui détient 75% des parts (financés en partie avec de la dette), accompagné par Demeter Partners et JP Dupire qui conserve une minorité.

 

Les Echos nous rapporte que le dirigeant, agé de 74 ans, n'ayant pas trouvé de successeur familial a dû se résoudre à cette cession à deux fonds d'investissement. Un manager a été recruté, Christian Guillou, qui va mettre en oeuvre la stratégie des fonds : poursuite du développement des concessions Invicta Shop initié par JP Dupire, croissance des ventes à l'export et acquisitions en Europe. Filiale de la Caisse des Dépôts, Qualium gère notamment un fonds FCPR, qui a finalisé une levée de 520 millions d'€ en juin 2012 auprès de 24 souscripteurs divers, français et internationaux (Amérique du Nord et Moyen Orient) : fonds de pension, compagnies d’assurances, banques, family offices, entrepreneurs investissant à titre personnel. La chance pour Invicta est que le fonds soit récent et que Qualium ne devra pas la revendre avant 6 ou 7 ans, probablement à un autre fonds avec une dette (LBO).

 

On peut toutefois s'interroger sur ce choix du dirigeant. Est-ce bien la meilleure solution de long terme pour son entreprise ? Le point positif est que Qualium a une solide expérience d'accompagnement de ses participations à l'international. Cela permettra sans doute à Invicta de progresser plus vite sur de nouveaux marchés, la meilleur option lorsqu'on est déjà leader sur son marché domestique. Il serait souhaitable qu'un actionnariat stable soit facilité par exemple en permettant aux 280 employés de l'entreprise de détenir une participation, ainsi que les dirigeants.

On peut l'espérer vu la belle histoire de la cession en février 2013 de Socotec par Qualium conjointement à la société d'investissement belge Copeba, qui est parait-il un acteur financier de long terme, aux employés et aux dirigeants.

Partager cet article
Repost0
20 juillet 2013 6 20 /07 /juillet /2013 18:24

En cette période estivale, la SNCF fait parler d'elle, pas seulement par l'affluence attendue dans ses trains mais aussi par le dramatique accident survenu le 12 juillet dans la gare de Brétigny sur Orge. Les enquêteurs n'avaient pas encore commencé leur travail que certains officiels et politiques ont déjà cru bon d'éliminer immédiatement certaines causes comme la malveillance. Ce qui semble très imprudent à ce stade et leur fait perdre toute crédibilité.

 

Il se trouve que, le même soir, j'ai eu la chance de pouvoir prendre à Austerlitz, le train de nuit « Intercités » pour les Alpes du Sud, un des seuls à partir de cette gare ce soir-là, après l'accident de Brétigny. Il y a plusieurs années que je n'avais pas pris ce train, qui est de loin le plus pratique avec sa correspondance à Gap pour arriver en début de matinée à Barcelonnette par le car de la compagnie régionale sur-subventionnée, la SCAL.

 

Première remarque : ce train partait autrefois vers 22h, maintenant c'est 20h, toujours avec une arrivée à Gap à 7h ; 2 heures de plus pour un trajet identique ! En fait, il ne roule pas moins vite mais s'arrête pendant plus d'une heure à Dijon, puis à Lyon et à Valence, sans doute pour laisser passer les rames de frêt à qui est donnée la priorité la nuit sur la ligne classique. Ces arrêts prolongés ont naturellement le don de vous réveiller pendant de longues minutes.

 

Deuxième remarque : le train était nettement plus court qu'autrefois avec seulement 6 ou 7 wagons. N'ayant eu aucune difficulté pour réserver ma place le jour même, jour qui devrait normalement être celui d'un grand départ en vacances, j'ai constaté en plus que mon wagon était loin d'être plein : décidément l'affluence attendue n'était pas au rendez-vous et la SNCF le savait puisqu'elle avait raccourci son train !

 

Troisième remarque : j'ai commis l'erreur de prendre un siège « inclinable à 45º ». Le prix est attrayant, comparé à la couchette, avec une remise de 25%. Malheureusement, ce type de siège est d'un inconfort total et je me demande bien qui peut arriver à y dormir. En fait, seul le dossier s'incline et la partie basse sur laquelle on est assis, reste horizontale et étant parfaitement plate, on n'est calé nulle part et l'inclinaison du dossier vous fait glisser vers l'avant. Si il n'y a pas de voisin, on peut essayer de se mettre en « chien de fusil » mais ce n'est pas idéal ! Sinon d'autres passagers se calent en posant leurs chevilles sur le haut du dossier du voisin de devant. Si l'un de mes lecteurs a trouvé par expérience la bonne position, qu'il me l'indique ! Le moindre siège sur un avion long courrier est 100 fois meilleur. On dirait que ces sièges ont été conçus avant la dernière guerre et n'ont jamais été redessinés.

 

Quatrième remarque : on vous annonce aimablement que des distributeurs de boissons et de « friandises » sont à disposition en voiture 17. Le malheur est que le fameux distributeur de boissons et friandises est en panne.

 

Cinquième remarque : bien que le train soit plein à moins de 50%, après 2 h de route, il n'y avait plus d'eau pour la chasse d'eau des deux toilettes de ma voiture, la 18. Décidément pas de chance !

 

Sixième remarque : la climatisation est restée bloquée au maximum toute la nuit, malgré plusieurs interventions des agents de la compagnie ferroviaire. Etant parti très vite avec peu de bagages pour mon cher pied-à-terre en Ubaye, je n'ai pu me couvrir et ne crois pas avoir souffert autant du froid depuis bien longtemps. Mes voisins et compagnons d'infortune avaient tous sortis tout ce qu'ils avaient comme duvets et vêtements chauds.

 

A l'évidence, la SNCF ne souhaite pas motiver ses usagers et néanmoins clients pour qu'ils continuent de voyager sur ce fameux train de nuit. Je lui prédit un avenir sombre et il sera probablement supprimé dans quelque temps. Il faudra alors se rabattre sur l'autre solution : TGV de jour jusqu'à Valence ou Grenoble puis TER (moderne mais financé par vos impôts de la région Rhône Alpes), un trajet de 5 à 6 h, ce qui en fait monopolise votre journée. A moins que vous tombiez sur le cas où le TER serait remplacé par un car qui lui met plus de 4 h entre Valence et Gap.

 

Je persiste à penser que la SNCF est une entreprise qui a pour stratégie réelle de soigner dans l'ordre : d'abord ses employés solidement organisés autour de leurs syndicats (retraites 50 ou 55 ans, voyages quasi gratuits,...), le TGV, et en tout dernier les clients des « Intercités » et des trains de banlieue. Manifestement la maintenance des trains Intercités laisse à désirer. On notera au passage que c'est également un Intercités qui a été accidenté à Brétigny.

 

Pour compléter, le car qui m'a amené confortablement jusqu'à Barcelonnette vers 9h 30 du matin n'avait que 7 passagers au départ de Gap. Il y a 15 ans, selon mes souvenirs, ce même car était rempli d'au moins 20 ou 30 passagers. Décidément ce service public n'intéresse plus grand monde. Et pourtant, le prix est très compétitif : 10 € pour un trajet de 65 km. Il est ainsi maintenu à grand frais, probablement financé par vos impôts.

 

Le retour sur Paris en couchette a été sans incident. Mais je mentionnerai tout de même que prendre le car impose de partir à 17h 10 de Barcelonnette pour le train de 22h.

 

De tout cela, il ressort que notre merveilleuse vallée de l'Ubaye reste bien peu accessible aux parisiens et peu connue. Les amoureux de la vallée ne s'en plaindront pas.  

Partager cet article
Repost0
29 juin 2013 6 29 /06 /juin /2013 18:40

Créée par Daniel Marhély et Jonathan Benassaya, Deezer lance son premier site Internet d'écoute de musique gratuit et légal le 22 août 2007. Multipliant les accords avec les majors de la musique et de nombreux indépendants, Deezer dispose très vite d'un catalogue impressionnant. Avec 100 millions de titres, 26 millions d'utilisateurs dont 2 millions d'abonnés aux offres Premium dans environ 200 pays, Deezer se positionne comme leader sur son marché. En 2011, Deezer est devenu le service de musique intégré à Facebook avec plus d'un million d'utilisateurs enthousiastes et a signé des accords avec de nombreux opérateurs comme Orange, Deutsche Telekom, Telenor, Millicom et Belgacom.

 

Voilà, se dira mon lecteur, un acteur français du numérique qui a su se développer en vitesse pour prendre la place sur un nouveau marché et devenir incontournable à l'échelle de la planète. Patatras, nous apprenons en octobre 2012 que Deezer a levé 100 millions € pour accélérer son développement mondial auprès d'Access Industries. Et les media reprennent l'information selon laquelle c'est une nouvelle pépite numérique qui part à l'étranger, s'ajoutant à une liste déjà longue, notamment iBazar rachetée par eBay en 2001, Price-Minister par Rakuten (Japon) en 2010, SeLoger.com par Axel Springer (Allemagne) en 2011.

 

Mais ce n'est pas aussi simple, car la transaction entre Deezer et Access Industries a été réalisée très discrètement. Il apparaît que Deezer a été valorisée environ 500 millions € et qu'Access Industries n'a pris qu'une participation minoritaire d'environ 25 à 30%. Deezer est ainsi toujours indépendant et, grâce à cet apport, capable de poursuivre sa croissance à marche forcée.

 

C'est donc une histoire différente qu'il faut se raconter. Le dynamisme et l'esprit de conquête d'Axel Dauchez qui dirige Deezer depuis 2010, une société imprégnée par l'esprit de partenariat avec les acteurs de la musique numérique, des auteurs aux distributeurs, font que cette pépite poursuit sa route avec indépendance et associée avec un partenaire solide comme Access Industries. Son objectif est 5% du marché mondial de la musique en ligne en 2016, focalisant d'abord les marchés émergents plutôt que les Etats-Unis où la concurrence est rude.

 

 

Access Industries

 

C'est une sorte de société holding fondée en 1986 et contrôlée par Len Blavatnik, investie dans le pétrole, l'aluminium, la chimie, l'immobilier, la télévision, la téléphonie mobile et surtout, depuis 2011, propriétaire de Warner Music Group. D'origine juive, Len Blavatnik est né en Ukraine et, après des études à Moscou, est parti aux Etats Unis en 1978. Le groupe est clairement positionné en Europe car c'est là que s'y trouvent la majorité de ses actifs ; il y a trois sièges : New York (siège social), Moscou et Londres où Len Blavatnik réside maintenant. N'étant pas coté, son chiffre d'affaires consolidé n'est pas connu, mais on peut l'estimer à environ 30 milliards $. Access Industries est clairement un investisseur de long terme, qui, depuis 10 ans, concentre ses interventions vers le monde des media et des télécoms.

 

 

Et Dailymotion ?

 

Le ratage récent de la prise de participation par Yahoo dans Dailymotion viendra naturellement à l'esprit. Et pourtant, face à YouTube adossée à Google, le développement et, je dirais même, la survie à terme de Dailymotion nécessite un partenariat fort avec un acteur mondial. Maintenant, la question reste entière : sur qui Dailymotion peut-il s'appuyer ? Heureusement dirais-je, on n'en parle plus et c'est sûrement mieux. Car l'attention portée sur cette affaire par les politiques et relayée par les media n'a certainement pas favorisé un processus de négociation calme et discret comme cela a été le cas pour Deezer. Le fait que 100% de Dailymotion soit détenue par Orange depuis janvier 2013, ne facilite pas les choses. Que vient faire d'ailleurs une future pépite de 200 geeks au sein d'un mastodonte de 170 000 employés, fonctionnaires pour certains d'entre eux ? Ils risquent fort d'être étouffés.

 

 

 

Partager cet article
Repost0
25 mai 2013 6 25 /05 /mai /2013 20:15

Pour de nombreux dirigeants et politiques, le rachat de Pechiney par Alcan en 2003 et la disparition de ce groupe plus que centenaire, fleuron de l'industrie française, a été un traumatisme. Et longtemps après, on en parle encore. L'État a été blâmé pour avoir laissé filer cette entreprise « stratégique », alors 3è producteur mondial d'aluminium.

 

Fondée en 1855 sous le nom de Compagnie des Produits Chimiques d’Alais et de la Camargue par Henry Merle et Jean-Baptiste Guimet, la société s'est rapidement lancée dans la production d'aluminium qui était alors un métal plutôt précieux car très coûteux à extraire de la beauxite produite en Provence. Devenue Pechiney en 1950, la société se lance dans des diversifications et des fusions-acquisitions majeures comme celle d'Ugine Kuhlmann qui lui donnent une allure de conglomérat et la fragilisent financièrement. Après la nationalisation en 1982, on assiste à un recentrage sur l'aluminium jusqu'à la privatisation en 1995. Mais malgré sa position forte de producteur, la rentabilité du groupe est médiocre et le canadien Alcan n'en fera qu'une bouchée en 2003, la payant 4 milliards € alors qu'Alcan en vaut près de 10 fois plus. Le groupe minier Rio Tinto rachète ensuite Alcan en 2007 et Pechiney disparaît encore plus.

 

Puis RioTinto qui a avalé Alcan pour 38 milliards $, décide de se séparer de toute la branche produits usinés nommée Alcan EP qui comprend de nombreux actifs de Pechiney, la considérant comme non stratégique ; c'est en effet bien loin du métier d'exploitant de mines qui est celui de Rio Tinto ! En 2011, le fonds d'investissement Apollo pour 51% et le FSI (l'Etat français) pour 9,4%, prennent le contrôle d'Alcan EP et le renomme Constellium. Il y a 10 000 employés dont 5 000 en France et un centre de recherche de 600 personnes à Voreppe (Isère).

 

Cette affaire a été présentée comme une sorte de rachat par la France du Pechiney parti en 2003. En fait, il ne s'agit que d'un petite partie de l'ancien groupe, dépendant de fournisseurs comme Rio Tinto (ou Rusal le russe qui est maintenant nº1 mondial) pour son métal et les alliages. Dans la filière aluminium, la technologie et la recherche se situent essentiellement dans la production du métal et des alliages. L'usinage de produits est une activité aval, proche des industries et entreprises utilisatrices : aéronautique, automobile, équipements pour le bâtiment, emballage, dont la valeur ajoutée est moins importante.

Il ne s'agit donc pas du tout de la reconstitution d'un groupe d'envergure mondial, intégré et aux laboratoires de recherche puissants, tel qu'était Pechiney.

 

Bénéficiant du développement de ses clients notamment dans l'automobile haut de gamme et l'aéronautique, le situation de Constellium s'est redressée avec un chiffre d'affaires de 3,61 milliards € et un résultat net de 142 millions € en 2012 après 4 années de pertes. Cela lui a permis de s'introduire en Bourse à New York et sur Euronext Paris (uniquement pour les professionnels) le 23 mai 2013. Le FSI en a profité pour en remettre une couche, en augmentant sa part du capital à 12,5%.

 

En parallèle, Constellium poursuit ses restructurations avec la mise en vente d'usines en France, à Ham (Somme) et à Saint Florentin (Yonne), son siège social est Schiphol-Rijk (Pays-Bas). Manifestement, pour cette entreprise, bien que sa clientèle soit plutôt « haut de gamme », la question de la compétitivité des sites français se pose avec acuité. Et si rien de plus n'est fait, les sites industriels français risquent de fermer les uns après les autres, Constellium déplaçant ses centres de production là où la compétitivité est la meilleure, afin de conserver ses marchés où elle est souvent numéro 1 comme les panneaux pour l'aéronautique. Comme l'a expliqué récemment son dirigeant, Pierre Vareille, avec l'argent levé en Bourse, la cible est le marché de l'automobile américain et le développement dans l'emballage en Chine ; les investissements iront donc d'abord dans cette direction.

 

On peut se demander à quoi sert l'investissement du FSI dans ce paysage, sinon à une tentative d'empêcher ou de freiner la fermeture de sites en France ainsi qu'une sorte de revanche sur l'histoire. Simultanément, l'introduction en Bourse n'a fait l'objet d'aucune promotion vis-à-vis des épargnants français, à l'opposé du temps des privatisations. De ce point de vue là, il ne s'agit sûrement pas de la renaissance de Pechiney. Décidément, Constellium n'est pas un groupe ancré en France, c'est un groupe mondial qui vise les marchés à potentiel pour son développement.

Partager cet article
Repost0