La presse s'est fait récemment l'écho de projections démographiques portant la population de l'Afrique de 1 milliard aujourd'hui à 2 milliards en 2050. De ce fait, on peut se demander si la pauvreté et le marasme économique ne risquent pas de continuer d'affecter ce continent dans les décennies à venir.
Selon une récente étude du cabinet McKinsey, il n'en est rien et au contraire l'Afrique est le continent dont l'économie décolle maintenant et qui a le plus fort potentiel. Entre 2000 et 2008, le taux de croissance de l'économie africaine a été de 4,9% par an et en 2008, le produit intérieur brut (PIB) du continent a été équivalent à celui du Brésil ou de la Russie autour de $1,6 milliards. Seulement 1/3 de cette croissance est due aux ressources naturelles (minerais, pétrole, céréales …). Les autres secteurs en croissance comprennent notamment le commerce, l'agriculture, la logistique, les télécommunications et l'industrie. Ce qui a engendré cette croissance, ce sont surtout : la fin de nombreux conflits armés, de meilleures conditions macroéconomiques (réduction de l'inflation, baisse des déficits publics et de la dette des Etats) et la création d'un climat plus favorable aux entreprises (privatisations, renforcement de l'environnement réglementaire et légal, baisse des impôts sur les sociétés, développement des infrastructures, zones de libre-échange). La pauvreté des africains a commencé à diminuer.
La question essentielle est de savoir si cette croissance va se poursuivre. L'Afrique va continuer à bénéficier de la demande croissante en matières premières avec 10% des réserves en pétrole, 40% de l'or et 80% du chrome ou du platine. Ces ressources se dirigent de plus en plus vers l'Asie : entre 1990 et 2008, le commerce de l'Afrique avec l'Asie est passé de 14% à 28% de son commerce global, alors que la part de l'Europe a baissé de 51% à 28%. De nouvelles formes de coopération se mettent en place entre la Chine, l'Inde, le Brésil, le Moyen Orient et les pays africains, l'accès aux ressources minières donnant lieu à des compensations en termes d'investissements en routes, chemins de fer, hôpitaux et écoles. La course aux ressources améliore la capacité de négociation des gouvernements africains. L'investissement direct étranger en Afrique qui est passé de $9 milliards en 2000 à $62 milliards en 2008 s'est dirigé non seulement vers les ressources naturelles mais aussi le tourisme, l'industrie textile, la construction et les télécommunications.
D'ici à 2040, la population active va augmenter de 500 millions à 1,1 milliards : le challenge pour l'Afrique est de former sa jeunesse. En 2040, 1/5 de la jeunesse mondiale sera africaines. En conclusion, l'étude indique que le marché des consommateurs africains croit 2 à 3 fois plus vite que dans les pays de l'OCDE (dits « développés »), la rentabilité des investissements est plus élevée que dans tous les autres régions émergentes.
Il semble que la France a conscience de l'opportunité qui se présente à elle. La récente réunion des chefs d'Etat africains à Nice le 30 mai et 1er juin, peut être l'amorce de nouvelles relations. La Françafrique a t'elle vraiment vécue ? Nos gouvernants ont-ils vraiment abandonné les vieilles habitudes de soutien aux régimes dictatoriaux et corrompus dont le principal souci était de faire grossir leurs comptes à numéro en Suisse, l'objectif étant de préserver l'accès au ressources naturelles moyennant des subsides et une « aide au développement » qui atteignaient rarement leurs buts. Mais ce n'est pas encore gagné quand on observe les manoeuvres d'Areva (derrière qui on ne peut s'empêcher de voir se profiler son actionnaire archi-principal, l'Etat français) au Niger pour préserver son accès aux mines d'uranium.
Face aux autres pays comme la Chine, qui investissent directement dans les infrastructures et les équipements, en échange de relations économiques de long terme, la France doit avoir un comportement d'investisseur « adulte » et absolument cesser de se mêler de la politique intérieure des pays africains. Les entreprises françaises ont encore souvent un avantage compétitif. On ne peut que souhaiter qu'elles poursuivent une stratégie d'investissements et de développement des marchés avec la même éthique qu'ailleurs dans le Monde, mais avec plus d'efforts car il y a en Afrique, plus de potentiel qu'ailleurs.